Commérages sous fond de tequila Ft Astrid

Cela faisait un moment que Buck traînait la patte du côté de Nemaia, heureusement pour lui ce monde aussi avait besoin de pompier. Atterrir dans ce monde avait été quelque chose de vraiment compliqué à vivre. D’ailleurs il ne le vivait toujours pas bien, être séparé de sa sœur et de sa nouvelle famille était une des choses les plus dures qu’il avait pu vivre. Il faisait face à la situation comme il le pouvait, et se noyer dans le travail était pour lui l’un des meilleurs remède pour éviter de trop cogiter. Autant dire que la navette jusqu’à l’hôpital du coin il l’avait faite une paire de fois, et ici ça ne dérogeait pas à la règle, son travail s’arrêtait aux portes de l'hôpital. Ça le tuait toujours autant tellement le sort des personnes qu’il accompagnaient jusque-là l'importait. Mais au moins il avait fait de bonnes rencontres, même aux portes de cet hôpital. Astrid était devenue une amie, autant qu’Athena ou des opérateurs du 911 avaient pu le devenir. Dans ces métiers il faut bien se serrer les coudes, sinon on perd vite pied. Ils s’étaient instauré des soirées dans la semaine pour traîner, boire un verre ce genre de chose et on peut dire que Buck attendait autant ces soirées qu’il attendait d’aller bosser chaque jour. Cela lui permettait de ne pas déprimer de ce qu’il avait perdu et de se focaliser sur le positif de ce monde. Je vous vois arriver, vous devez vous dire qu’il avait dû en profiter pour la dragouiller mais en réalité il n’en était rien, il n’avait même pas tenté, pas une allusion. C’est qu’il avait grandi, évolué au fil du temps.

Même jour, même heure, ils étaient presque réglés comme des horloges, c’est que ça commençait à faire plusieurs semaines qu’ils s’accordaient ce moment de potin et de légèreté dans leurs jobs pas toujours très joyeux. Ils s’étaient mis à une table et avaient commandé des verres et des tapas, il faut pas pousser mamie non plus des bons potins ça se rencontre autour de verres et de nourriture. “Tu poses la question de comment s’est passé ma journée pour éviter de commencer ou parce que t’as envie d’éviter la question ?” avait-il balancé avec un sourire lorsqu’elle avait commencé les hostilités. “Et bien tu apprendras que parfois un pompier doit correspondre aux clichés et sauver de pauvres petits félins coincés sur un arbre. Ça reste moins drôle que le fuyard cerné sur un toit et ça laisse moins de matière à des paris entre collègues mais ça a été globalement le taff de ma journée, en tout cas l’intervention la plus mémorable. Pourquoi je t’ai manqué aux portes des urgences ?”

Ce genre de sortie c’était quelque chose qui avait manqué, quelque chose qui manque car c’est à la fois si simple et si réconfortant. Il n’avait plus pensé à s’ils allaient faire quelque chose ou non avec ses collègues aussitôt qu’il avait intégré le concept des repas en équipe. Ca n’était pas juste l’occasion de manger à côté des uns et des autres, c’était un vrai moment de partage et de convivialité. Ses collègues à Nemaia étaient plutôt gentils et agréables mais jamais ils n’avaient pu combler le vide qu’avait créé l’absence de la 118. En échouant ici il avait perdu sa famille, ses amis et surtout sa seconde famille. Astrid avait été la seule amie vraiment proche qu’il s’était fait jusqu’ici, pas qu’il ne soit pas amical ou quoi que ce soit, Buck était d’un naturel social et optimiste mais peut-être avait-il peur de trop s’attacher au risque de perdre une nouvelle fois. Son amitié avec Astrid s’était faite naturellement et il ne lui avait jamais dit mais il était incroyablement reconnaissant de cette amitié. Il avait lancé un grand sourire à Astrid lorsqu’elle lui avait affirmé le contraire de ce qu’il avait prédit, en vrai il en était content. “Ah tant mieux des journées de calme ça fait pas trop de mal de temps en temps.”  S’amusa-t-il. Les journées aux urgences pouvaient être éprouvantes aussi bien physiquement que mentalement, si Buck voyait des choses pas toujours très drôle elle elle devait s’occuper de la partie la plus lourde émotionnellement parlant.

Il avait lancé le fait qu’il lui avait manqué comme une petite blague, le fait que deux “collègues” qui s'apprécient tente de trouver n’importe quel petit prétexte pour se croiser. Leurs interactions étaient toujours très brèves, les deux ne pouvant pas se permettre de perdre du temps car la vie de personnes pouvaient se jouer sur les secondes, minutes qui viennent. Ils n’avaient donc pas le temps de se raconter leur vie respective, mais au moins un ou deux mots selon la gravité de l’intervention. Si l’idée qu’elle ait eu une journée assez calme lui suffisait il ne s’attendait pas à ce genre d’information, c’était loin de lui déplaire mais c’était assez inattendu. “Stella ?”  Il lui avait parlé de cette fille qui avait fait une chute malencontreuse pendant une randonnée et qui s’était blessé, c’était plus que probable qu’il lui ait dit qu’il la trouvait mignonne. Il avait répondu innocemment sans même se dire qu’Astrid avait fait exprès de soi-disant oublier le nom de la jeune femme. En même temps il y avait de quoi le charrier, Buck parlait souvent sans réfléchir et trop vite pour vraiment réfléchir avant de prononcer un mot, et souvent il faisait preuve d’une innocence qui faisait son charme. “Ca va mieux sa cheville ? Attends.. Elle a demandée de mes nouvelles vraiment ?”  Il n’avait compris qu’après avoir prononcé cette phrase, qu’après avoir reporté son regard sur le visage souriant et satisfait d’Astrid. S’il avait voulu caché que ça lui faisait plaisir il était mal parti, mais ça n’était pas vraiment son but, et puis Astrid savait déjà que la rouquine lui avait tapé dans l’œil. “Punaise.. Tu t’en souvenais très bien en fait !”

Astrid était devenue la personne la plus proche de lui en peu de temps. Ca avait été facile pour eux de devenir amis, elle était sa meilleure amie, une sœur, et il n’aurait pas pu être plus reconnaissant à ce monde de l’avoir mise sur sa route. Leurs soirées rituelles était quelque chose dont il avait toujours hâte même lorsque là elle s’amusait à le taquiner. “Oui, pourquoi je devrais systématiquement oublier le nom des personnes que j’aide ?” Non mais cette phrase était une excuse bidon. Il ne pouvait pas prétendre se souvenir des noms de tout le monde, il y avait des cas qui restait en mémoire pour des raisons diverses et variées. Stella ne lui était pas resté en mémoire à cause de son sauvetage en lui-même. Elle lui avait fait grande impression et même si c’était très peu professionnel de sa part il ne pouvait pas nier qu’il avait eu un faible pour la rouquine. Buck avait beaucoup de qualité mais il n’était pas forcément bon pour être discret sur ce genre de chose, sa façon d’en parler ou de la regarder, tout ça se voyait comme le nez au milieu de la figure et s’il était insistant elle allait probablement se dire qu’il était flippant.

Il avait mis du temps à comprendre que Astrid était en train de le taquiner mais il avait fini par le remarquer. Tout ça semblait grandement l’amuser d’ailleurs, mais il ne pouvait pas lui en vouloir pour ça, car à sa place ça l’aurait grandement amusé aussi. “Tant mieux si sa cheville va mieux.” Évidemment ce n’était pas spécialement ce qui l’intéressait le plus lorsqu’elle avait lancé le sujet mais il devait avouer qu’il ne savait pas trop ce qu’il devait faire du fait que Stella avait demandé de ses nouvelles. “Elle demandait juste comme ça en passant ou.. ‘fin tu vois quoi ?” Ça y est il mettait les deux pieds dans le plat, de toute manière faire comme si ça ne l’intéressait pas était devenu inutile. Elle avait remarqué son intérêt pour Stella sans qu’il ait eu à en parler toute la journée. Bien entendu, elle n’allait pas changer de sujet sans qu’il ait donné plus d’informations. Alors c’était évident qu’elle allait le cuisiner directement parce que lui ne lâcherait pas le morceau de lui-même.

Il avait été pris au dépourvu par cette question, pourtant il aurait dû s’attendre à ce qu’elle soit posée. “Oh bah..euh..” A vrai dire pour le moment il n’avait pas encore de réponse, il était encore très indécis sur le sujet. Il bu une grande gorgée de son verre, peut-être pour se donner plus de courage, peut-être pour retrouver plus de contenance, en fait il n’en savait trop rien. “En fait je ne sais pas si c’est une très bonne idée que je le fasse, même si j’en meure d’envie.” On peut dire qu’il n’avait pas été très chanceux côté coeur, surtout lorsque ses relations avaient démarrées par un sauvetage. “J’ai eu des relations un peu catastrophiques et des rien qu’à cause de mon job j’ai pas très envie que ça recommence..” Avoua-t-il enfin. C’était une raison peut-être bête parce qu’il ne pouvait pas être sûr de l’avenir mais ça restait quelque chose qu’il avait en tête. “Tu crois que je devrais quand-même ? Si ça strouve je me fais des film et elle va m'envoyer sur les roses.”

Il semblait que les commérages du jour allaient tourner autour de lui, il aurait dû s’y attendre vu qu’il n’avait pas été très discret par rapport à son inclination pour Stella. Si les rôles avaient été inversés il en aurait sans doute fait de même, mais ce n’était pas Astrid et sa vie sentimentale le sujet, c’était lui. De plus Astrid savait quoi dire pour le désarçonner, ce n’était pas compliqué Buck avait toujours été un peu comme ça, si on disait les bon mots on pouvait le perturber. “Tu marques un point.” Il devait bien l’avouer qu’il ne se souvenait pas de toutes les personnes qu’il avait aider ou sauver, Stella faisait partie des rares noms qui l’avaient marqué et pas dans un mauvais sens. C’était plus qu’évident qu’Astrid pointerait du doigt ce genre de détail parce qu’elle savait ce que c’était de voir autant de personnes dans une seule et même journée comme lui le faisait, avec des circonstances bien particulières.

Ce serait mentir que de dire que ça ne lui faisait pas plaisir de savoir qu’elle avait demandé de ses nouvelles. Rien que ça, ça prouvait qu’elle ne l’avait pas oublié non plus et que peut-être était-elle dans le même cas que lui. Comme sa comparse de commérages n’allait sans doute pas le laisser s’en tirer comme ça, Buck s’était rendu à l’évidence qu’il allait devoir lâcher le morceau. Il a fini par balancer ce qui le tracassait, ses doutes, ses inquiétudes, le pêle-mêle qui faisait qu’il n’avait encore rien tenté avec Stella. Pourtant Buck savait faire un premier pas pour aller vers les femmes, pour aller à un premier rendez-vous alors s’il ne le faisait pas c’était que quelque chose l’en empêchait. “Peut-être mais au final c’est un peu pareil qu’une intervention.” Il craignait que ce genre de rencontres ne crée un genre de faux sentiments qui finissait par s’estomper comme avec ses relations passées. “C’est que si ça ne fonctionne pas je vais commencer à me demander si je ne suis pas maudit ou un truc du genre. Et puis malheureusement les sentiments ça ne suffit pas toujours.. Tout le monde ne peut pas supporter d’être avec quelqu’un qui risque sa vie h24, nan mais Astrid regarde moi je suis presque surpris qu’il ne me soit pas arrivé un truc aussi gros que de me prendre la foudre ! Et le pire dans tout ça, c’est que ça ne m’empêchera pas de retourner en intervention.” Il était complètement accros à son travail, c’était ce qui le faisait vibrer, le but de sa vie et il ne pouvait pas s’en passer. “Au final c’est peut-être bien moi qui vais finir vieux avec plein de chats.” Avait-il conclut avec une grimace. “Et toi Cupidon, côté cœur ?”