(WILLIAM) in my mind

Incomplet. Sensation à laquelle William n’arrive plus à se soustraire,chaque instant le ramenant inexorablement à ce trou béant au fond de lui. Il n’est pas vraiment lui-même, prisonnier dans le corps d’un autre, et sans son frère jumeau, il lui manque l’essentiel. Parfois, il se bat encore avec la sensation que le cœur qui bat dans sa poitrine n’est pas le sien. Un peu comme s’il n’était qu’un imposteur dans cette enveloppe charnelle qu’il a malgré lui volé à son véritable propriétaire.

William Kaplan, un adolescent mort à l’âge de treize ans alors qu’il avait encore une famille, des parents, un avenir… Souvent, le sorcier se perdait à penser que sans lui, on aurait peut-être pu ramener ce pauvre Billy Kaplan. Néanmoins, peu importe combien il était difficile de vivre avec ce tourment émotionnel constant, le jeune homme essayait malgré tout de survivre. Il avançait, petit à petit, vers le chemin de la guérison. Un jour, il serait certainement capable de laisser tout ça derrière lui mais pour l’instant, il était surtout un pauvre gamin qui priait jour après jour de pouvoir retrouver cet être si important qui lui manquait.

Lentement, il s'avançait vers un lieu qu'il n'avait que brièvement connu. À son arrivée à Nemaia, William avait entendu parler de cet endroit un peu particulier, un lieu où sorciers et autres créatures magiques coexistaient. Plein d'espoir, il s'était rendu là-bas, convaincu qu'il pourrait retrouver son frère ou l'une des sorcières de son coven. Mais à son grand désespoir, il était seul. Ni Agatha, ni Lilia, ou même Rio n'avaient jamais mis les pieds ici. Quant à Tommy, personne n’en avait jamais entendu parler.

Un vide immense le saisit à l'idée qu'il puisse vraiment être seul, sans réponse, sans repère. Ce lieu, censé être une promesse de retour à un monde qui lui était familier, n'était que le reflet d'une quête infructueuse. Il aurait voulu croire que cet endroit, avec sa magie étrange, pourrait l'aider à recoller les morceaux de sa vie brisée. Mais chaque pas qu'il faisait ne faisait qu'aggraver le gouffre qu'il portait en lui. Un espace, une absence, un frère perdu à tout jamais.

Pourtant, il était là, debout dans le grand hall, comme guidé par une force qu’il ne comprenait pas vraiment. Sans certitude ni explication, William espérait que ce lieu - Hom’warts, à la réputation singulière - pourrait combler le vide qui le hantait. Peut-être, en errant dans cet endroit chargé de magie, parviendrait-il à apaiser ce sentiment d’incomplétude qui ne le quittait jamais. À défaut de retrouver son frère jumeau, il espérait au moins trouver ici une réponse, un signe, un éclat de ce qui lui manquait si cruellement. Mais rien n’y faisait. Le hall immense, les murmures des lieux enchantés, tout cela ne faisait qu’accentuer le gouffre qu’il portait en lui.

Doucement, il pénétra dans la grande salle, immense et silencieuse, bien plus vide qu’il ne l’avait imaginée. La pièce, bâtie dans le style d’un vieux château anglais dédié à l’enseignement de la magie, semblait pouvoir contenir des foules entières. Ses plafonds se perdaient dans la hauteur, et les murs anciens résonnaient d’échos d’un passé révolu. Mais à cet instant, l’endroit n’abritait qu’une seule autre âme, une présence errante qui se fondait dans le calme oppressant des lieux.

William avançait à pas lents dans l’immensité de la salle, chaque mouvement résonnant faiblement dans le silence solennel. Il hésitait à dire quoi que ce soit, redoutant d’être un intrus en ces lieux ou craignant de troubler la quiétude enveloppante qui l’entourait. Peut-être était-ce la peur de se sentir encore plus seul en rompant ce calme fragile.

Finalement, dans un murmure à peine audible, il osa : « Bonjour. »

Hésitant, William sentit son cœur se serrer. Les jours défilaient, et Tommy ne réapparaissait toujours pas. L’absence de son jumeau creusait un vide en lui, bien plus profond que ce qu’il aurait pu exprimer avec des mots. La douleur était si vive qu’il s’efforçait de la combler comme il le pouvait, tentant de reconstruire sa vie sans lui. Pourtant, se réinventer sans Tommy, alors qu’il ne savait pas encore vraiment qui il était, n’avait rien de simple. Parfois, il se surprenait même à se demander si, en tournant cette page, il ne le trahissait pas d’une certaine manière.

En contemplant les vastes tables presque vides et les grandes fenêtres embrumées, William ressentit un pincement au cœur. Ce lieu, autrefois empli de rires et d’éclats de voix, semblait désormais enveloppé d’une mélancolie sourde. Il savait pourtant que, même dans le silence, Hom’warts restait un lieu d’une importance inestimable. Chaque mur, chaque recoin de ce château portait l’empreinte de ceux qui y avaient trouvé réconfort et espoir.

Pourtant, l’absence de son frère lui rappelait cruellement à quel point ce sanctuaire pouvait paraître vide sans ceux que l’on aime. Au fond de lui, William espérait encore que Tommy franchirait un jour cette porte, ramenant avec lui l’énergie et la chaleur qui semblaient s’être évaporées. Mais plus le temps passait, plus l’idée de cette réunion lui semblait lointaine, presque irréelle.

Un frisson traversa William alors qu’il avançait dans la grande salle, ses pas résonnant contre les murs de pierre. Son regard se posa soudain sur un autre jeune homme, à peine plus âgé que lui, dont les cheveux bruns encadraient un visage marqué par la même solitude. Ses yeux d’un bleu profond reflétaient une tristesse familière, celle d’une vie où quelque chose d’essentiel manquait.

Un sourire mélancolique se dessina sur les lèvres de William. S’il n’était pas le plus enjoué des deux frères, il savait pourtant comment masquer ses émotions, comment jouer le rôle du jeune sorcier innocent et léger.

« Je cherche mon frère jumeau, Tommy. » murmura-t-il presque pour lui-même, ses mots à peine audibles. « Je doute qu’il soit ici, mais… on m’a dit que Hom’warts était un refuge, un endroit où l’on pouvait trouver la paix. Alors, j’avais espéré que, peut-être, il finirait par revenir. »

Sa voix se perdit dans le silence de la salle, et il sentit ce même poids s’alourdir sur ses épaules. Pourtant, il demeura là, guettant encore un signe, aussi infime soit-il, qui le rapprocherait de son frère.

« Est-ce que toi aussi, tu espérais peut-être voir quelqu’un d’autre ? » demanda William, la voix teintée d’une douceur sincère.

Face à lui, le jeune homme aux yeux bleus leva lentement le regard. William ne connaissait rien de sa réputation ni de ce qui le tourmentait, mais il devinait sans peine la mélancolie qui se cachait dans ses traits. C’était presque naturel pour lui, comme une seconde nature. Avec le temps, il avait appris à percevoir les émotions des autres, parfois même sans faire appel à son don d’empathie.

Un bref silence s’installa entre eux, chacun observant les traces de souffrance dissimulées dans le regard de l’autre. William se sentait étrangement apaisé par cette connexion silencieuse. Peut-être qu’ici, dans ce château où se mêlaient les espoirs et les blessures de tant de sorciers, il finirait par accepter  l’absence de Tommy – et trouver une part de lui-même dans ce lien fragile qu’il venait de nouer.

Le sourire mélancolique sur le visage de William semblait figé, comme s’il s’y était accroché pour masquer ce qui se tramait derrière ses yeux clairs. Le jeune homme en face de lui dégageait une sincérité qui, contre toute attente, réchauffa un peu son cœur. William n’était pas sûr de pouvoir s’ouvrir si facilement, mais il devinait que le brun était un sorcier altruiste, prêt à tendre la main à ceux qui en avaient besoin. Cela suffisait à alléger légèrement le poids sur ses épaules. Pourtant, au fond, il savait que ce garçon ne pourrait sans doute pas l’aider à retrouver Tommy.

« Je ne pense pas que Tommy soit déjà venu ici. » dit-il doucement, la voix posée mais teintée d’un fond de tristesse. « Il est… enfin, disons que c’est un peu plus compliqué que ça. J’ai juste cette sensation étrange, cette idée qui ne me quitte pas : peut-être qu’il aurait pu, lui aussi, apparaître à Nemaia. Et si c’était le cas… je crois que j’aurais aimé qu’il puisse trouver un endroit comme ici. »

Il marqua une pause, son regard se perdant sur les grandes fenêtres embrumées de la salle. L’endroit dégageait une sérénité rare, comme s’il voulait promettre à ceux qui s’y trouvaient un instant de répit. Hom’warts avait ce pouvoir-là : offrir du calme même aux âmes tourmentées. William détourna les yeux des fenêtres pour les ramener sur le jeune homme en face de lui. Il semblait à la fois distant et présent, comme s’il portait lui aussi le poids d’un monde qu’il ne pouvait pleinement partager.

« Mais, tu sais… » reprit Billy après un moment de silence, « Peut-être que c’est pour ça que je suis ici. Pas seulement pour chercher Tommy, mais aussi… pour essayer de comprendre ce que je fais encore debout, à avancer. »

Il releva les yeux, un éclat plus franc traversant son regard. « Et toi ? Tu parlais d’attendre des amis. C’est comme si, toi aussi, tu étais pris entre deux mondes. Ce que tu cherches… c’est quelque chose de précis d’autres ou… C’est juste l’espoir que quelqu’un vienne te retrouver, comme moi avec mon frère ? »

Il hésita un instant avant d’ajouter, dans un souffle presque imperceptible : « Parce que, si tu veux tout savoir, je crois que ça me fait un peu moins peur, d’attendre, en sachant que je ne suis pas le seul. »

Après un bref instant, William sembla réaliser quelque chose. Il se redressa légèrement, comme pris d’une pointe d’embarras. « Oh, pardon. J’ai failli oublier de me présenter. Je m’appelle William Maximoff. Mais… tout le monde m’appelle Billy. » Il esquissa un sourire, léger mais sincère. « On s’est peut-être déjà croisés quelque part ici, mais je ne crois pas que je connaisse ton nom. »

Un silence doux s’installa à nouveau, entrecoupé seulement par le crépitement des chandeliers flottants et le murmure presque imperceptible du vent qui s’infiltrait à travers les grandes vitres. William s’adossa légèrement contre une table en bois massif, comme pour s’ancrer dans cette conversation qu’il n’avait pas prévu d’avoir mais qu’il ne regrettait pas.