Haaave you met.. what's your name, though ?

T'en avais vu, des trucs bizarres, depuis que t'avais atterri ici. Et d'ailleurs, ici, c'était où ? tu savais pas vraiment. Ni comment t'étais arrivé là, ni ce que t'étais censé y faire. Les plus paranos auraient probablement pensé qu'on les avait drogués, foutus dans une pièce, voire dans une ville bizarre histoire d'amuser la galerie, mais ça, ça n'arrivait que dans le Truman Show. Et puis, en y réfléchissant, t'avais bien analysé le truc: pas de caméras à la ronde. Pas, non plus, de patterns copie conforme: non, ton voisin n'avait pas toujours les mêmes moves quelque part, ça te rassurait. Pourtant t'étais pas certain que ça doive suffire; depuis que t'avais ouvert les yeux ici, il t'avait semblé voir des sorciers, vampires et autres fées sorties tout droit de ces programmes pour gamins dont tes enfants rafo... attendez une minute. Tu te souvenais de rien et pourtant, t'avais la sensation étrange d'avoir oublié un truc important, convaincu que t'avais des enfants là, quelque part, sans pour autant te souvenir de leur nom ou... de leur mère ? si t'avais une famille, elle était bien cachée. L'idée d'avoir pu oublier ce que t'avais attendu toute ta vie te donnait le vertige. Autour de toi, pas l'ombre du MacLaren's, encore moins les frasques épuisantes de Barney, dont t'étais le meilleur pote -- l'inverse resterait à prouver; bien que tu l'aimes bien, ce crétin, t'aimais aussi ta tranquillité avec Marshall et Lily. La seule chose dont t'étais certain, c'est que tu n'étais pas à New-York. T'aurais bien dit qu'à en juger par tes hallucinations, tu avais mangé "un sandwich" en arrivant, mais quand même, ça durait pas aussi longtemps, normalement. Tu trouverais une explication rationnelle à tout ce bazar plus tard. Peut-être avais-tu pris un coup sur la tête ? en attendant, tu décidais d'aller faire un tour, voir ce que tu pourrais éventuellement trouver alentour. Un téléphone, peut-être ?

Perdu dans ta recherche et tes hallucinations qui te faisaient de plus en plus flipper (sérieusement, t'aurais même pas trouver bizarre que Dark Vador ne vienne te saluer, là, tout de suite.), tu n'as même pas vu la jeune femme que tu venais de bousculer. Le choc te surprend, te ramenant sur terre et, avant qu'elle ne se cogne douloureusement au sol, tu parviens à la rattraper par le bras. Elle te dit quelque chose, mais tu n'arrives pas à te souvenir d'où vous auriez pu vous rencontrer. "Tracy ?!" que tu lances pourtant d'une facilité déconcertante, sans comprendre d'où ce prénom te revient. Pourtant, il est là, comme une évidence. Tu comprends pas. Ca t'échappe. Il se passe définitivement des choses pas nettes, ici.

Bizarre. Tout était définitivement bizarre. Tu te sentais con, de n’avoir que ce mot en bouche et en pensée, mais toi qui aimais ton petit confort et ta tranquilité, tu te posais là ! Toujours eu le besoin de te rassurer, tu connaissais ta ville et son architecture sur le bout des doigts, quitte à ce que ça implique de saouler tes amis lorsque tu leur faisais un cours d’histoire de l’art sur les façades art-déco ou autres easter eggs de la vie qui toi, te fascinaient, mais les bombait terriblement. Remarquez, à observer autour de toi, il fallait bien admettre que l’endroit où tu étais n’avait rien à envier à New-York : l’architecture était aussi belle que surprenante.

Note à toi-même : squatter une bibliothèque pourrait être une bonne idée, pour en apprendre un peu plus sur le contexte de construction de la ville, l’art du coin, ce genre de choses. Avec un peu de chance, ça t’aiderait à comprendre où tu es, non seulement de t’apprendre des choses intéressantes…

Pour l’heure, tu ne rêves que d’une chose : rentrer te mettre à l’ombre, t’as l’impression d’avoir perdu trois litres depuis ton arrivée dans la région de Lodium. Tu avais voulu visiter pour sa ressemblance étrange avec Tatooïne, sans doute à cause du côté désertique – putain, pourquoi t’es pas allé au Sahara ou te perdre dans le désert de Gobi, plus jeune ? ah. Oui : courageux, mais pas téméraire, le Mosby. C’est d’ailleurs souvent à ça qu’on te reconnaît, bien que tu puisse vouloir faire avaler le contraire à ton entourage.

T’es sorti de ton laïus mental par la jeune femme : on se connaît ? Ben… euh… il est bien là, le problème : t’en as aucune idée. Tu ne sais pas d’où est venu ce nom mais si ça la surprend autant, c’est sans doute que tu es tombé juste. Tu restes perplexe et l’observe, te donnant l’air bizarre d’être tombé du ciel « j’en ai pas la moindre idée… est-ce que … tu viens de New york ? » avais tu hasardé en relâchant ton emprise sur son bras, puis lui tendis la main « puisque je suis visiblement devenu mentaliste… j’m’appelle Ted. » tu lui adressais un sourire, avant de demander, curieux « au fait… euhm… ça risque de te paraître totalement étrange mais… t’as une idée d’où on se trouve, ici ? » t’avais besoin d’en avoir le coeur net : est-ce que tu étais devenu tout simplement dingue, ou avais-tu atterri de façon mystérieuse quelque part dont tu ne soupçonnais pas l’existence ? Ça te paraît dingue, t’oses même pas y penser tellement c’est improbable, digne des programmes devant lesquels vous aimez vous abrutir avec Marsh’ ;mais ça expliquerait tellement de choses…

Moment de flottement, non pas dérangeant mais perturbant. Tu observes la jeune femme, son regard, qui éveille en toi quelque chose au creux de ton estomac sans que tu ne puisse comprendre d’où ça vient. Qu’aviez-vous été l’un pour l’autre, pour que ça te prenne aux tripes ? Tu hésites, parce que maintenant, tu sais qu’elle vient de New-York tout comme toi, mais et ensuite ? Qu’est ce que tu allais bien pouvoir inventer pour continuer la discussion ? Nom de dieu, t’en aurais presque regretté que pour une fois, Barney ne soit pas avec toi : lui au moins, il aurait su quoi dire, il avait toujours eu un bagou que souvent tu lui enviais. Remarques, tu n’avais pas spécialement envie de la draguer, elle était très belle, semblait gentille, mais t’étais surtout intrigué par ce truc, là, indescriptible que tu ressens et auquel tu as besoin de donner une explication. Et là, tu blémis. « T-Dog ». Mais qu’est ce qui t’avait pris, ce jour là ? Tantôt professeur psychopathe et tyran, tantôt cool – trop cool, au point de t’inventer des surnoms ridicules, tu avais du passer pour un sérieux crétin. Tu restais là, gêné face à la brunette, la bouche légèrement entrouverte, tiraillée entre l’envie de fuir et de… de quoi ? T’en sais rien. T’aurais bien dit « sauver les apparences », mais si elle avait assisté à ça, plus besoin de chercher quelque dignité que ce soit. « T’as bon pour… le nom. Enfin. Oui. Mais non. Appelles moi Ted si tu veux : T-Dog, ça fait gars qui se donne un genre. Ce que j’ai clairement voulu faire visiblement. Me dis pas que tu as assisté à ce naufrage ? » tu réprimais un léger sourire, essayais de te sortir de ta gêne et haussais les épaules « presque. Architecture 101. » un sourire cette fois plus franc s’étirait sur tes lèvres, et tu enfournais ton poing dans les poches, cogitant de plus belle. Cette fille, elle ne pouvait pas être seulement une étudiante. Certes, certains vous laissaient un souvenir impérissable, mais tout de même ! « tu … Je suis désolé, je vais te paraître fou, mais j’ai la sensation qu’on ne se connaît pas seulement de la fac… Est-ce que… Tu allais souvent au McLarens toi aussi ? » tu t’arrêtais soudain et repris, un peu gêné « désolé. Je suis lourd. C’est juste que… j’ai aucune idée d’où on est, j’me souviens pas de grand-chose… c’est bizarre, tout ça. Ca fait longtemps que tu es ici, toi ? » visiblement plus longtemps que toi, en tous cas. Parce qu’elle semblait vachement plus à l’aise dans son environnement que toi : t’avais la facheuse impression d’être un lapin pris dans les phares d’une voiture, craintif et pataud, du moins plus que d’habitude, tu savais même pas que c’était possible ! Enfin ça, c’était jusqu’à ce qu’elle ne chancelle et qu’instinctivement, tu ne la retiennes, la serrant contre toi et tu demandais, surpris et inquiet « tout va bien ? T’es blanche comme un linge ! Tu veux qu’on aille manger ou boire quelque chose ? »

Amusé par sa réponse, tu arques un sourcil. T-Dog. Un peu plus et tu t’en mordrais les doigts, pourquoi fallait-il que tu ouvres trop ta bouche ? Pourquoi, quand t’étais en putain de panique, tu te sentais obligé de faire le mec cool ? Pathétique. Tu mordais ta lèvre inférieure, un peu gêné et honteux de ce move débile, devenu visiblement indélébile pour cette fille qui se souvenait visiblement de toi… Mais pas l’inverse. Pourquoi est-ce que tu ne t’en souvenais pas ? Tu retournais l’histoire dans tous les sens. Quelques flashs de son sourire, des larmes sur ses joues. Est-ce que c’était toi, qui l’avais blessée ? Aucun moyen pour toi de le savoir. Du moins pour l’instant. Parce que tu te voyais mal lui poser cette question : j’t’ai fait pleurer ? Non. T’aurais l’air sacrément con, tout ça sorti de nulle part. A sa remarque, tu réprimais un rire et haussais les épaules « Oh. Autant pour moi. Visiblement, je suis bien meilleur architecte que prof, hm ? » tu lui adressais un clin d’oeil moqueur, pas tant envers elle, mais envers ton toi passé, toujours aussi ridicule que celui que t’étais devenu, à l’exception prêt que toi, tu l’assumais, maintenant. Et puis t’as vu, tout à coup sa pâleur, et ses forces qui la quittaient. Et sans vraiment t’y attendre, tu l’as rattrapée, un peu comme dans ces films à l’eau de rose couillons dont vous adoriez vous moquer avec Barney ; surtout lorsque Lily les regardait, elle, au premier degré. Ca va aller ? T’en étais pas si certain. Mais tu la laissais dire, inquiet, relâchant ton emprise sur elle. « euh… oui ? Pourquoi ? Comment… ? » tu sais ? Question conne : elle se rappelait de T-Dog, sûrement que t’étais catalogué depuis belle lurette. Tu lui adressais un léger sourire, presque gêné « Bon. Je sais que tu t’appelles Tracy, toi, tu sais pour T-Dog, on vient de New-York… mais je n’ai toujours aucune id… bon sang ! Le mariage de Barney ! Tu étais à Farhampton, n’est-ce pas ? » tu ne te souvenais pas de grand-chose, mis à part de votre désaccord sur ce fameux parapluie jaune. Tu fronçais les sourcils « tu as toujours mon parapluie, jolie T.M ? »

T’aurais aimé qu’elle ait oublié cette partie de l’histoire. Après tout, en arrivant ici, il y avait pas mal de choses, visiblement, qui étaient passées à la trappe, alors pourquoi pas ça ? Ennuyé, tu grimaces légèrement et tu hausses les épaules « dans ce cas… Je peux t’assurer que je suis meilleur architecte. Mes potes disent que je suis trop bassinant, quand je commence à faire mon shtroumpf à lunettes. Et sans doute qu’ils n’ont pas tort, en vérité. » tu réprimes un rire : même si tu n’aurais jamais voulu donner raison à Barney, force était de constater que ceux qui se la pétaient avec leur savoir n’avaient pas toujours la côte. Après tout, vous savez ce qu’on dit : la culture, c’est comme la confiture. Moins on en a, plus on l’étale. Sans doute pour cette raison que tu ne t’étais jamais considéré comme l’intello de la bande : t’étais trop beau parleur pour ça. Mordilles ta lèvre inférieure, ta main se glissant dans ta poche. T’espérais y trouver de quoi fumer. Ne pas savoir ce qui a pu se passer ou non avec elle te rend nerveux. Ne plus te souvenir, control freak que tu es, ça te tend. Tu ne fumes pas de façon quotidienne, juste en cas d’extrême urgence, lorsque l’angoisse ou la nervosité sont trop fortes : le shoot de nicotine te permet de réfléchir. Mais tu n’as rien. Tu crois maintenant te rappeler que tu as arrêté totalement il y a quelques années. T’en es certain. Tu revois Barney, moqueur, te dire que tu fous le camp. D’abord les gosses, maintenant la clope… attends. Les gosses ? Quels gosses ? T’as aucun souvenir de t’être marié, voilà qu’en plus t’aurais oublié tes propres gamins comme ces gens que tu jugeais, dans les reportages à la télé, oubliant leurs enfants sur les aires d’autoroute ? Un vertige s’empare de toi, tu hésites. Tu viens la rejoindre sur le banc et lances, hésitant « ou peut-être que c’était le tien. On a jamais été très clairs, sur la question, en vérité, je crois. » la seule chose dont tu te souviens, c’est de l’avoir trouvé : il t’appartenait, donc, par procuration. Mais tu n’avais pas prévu de rencontrer un jour la propriétaire, par le plus grand des hasards… Ni qu’elle fasse partie de ta vie. Instinctivement, ta main vient se poser sur sa jambe. T’es inquiet. « hey… t’es sûre que ça va ? Tu vas finir par devenir transparente… je peux faire quelque chose ? » mais à ton tour, c’est toi qui pâlis « attends… quoi? » tu n’oses pas y croire. Tu cherchais sans savoir vraiment ce que tu étais censé trouver et ça avait fini par te tomber dessus, sans crier gare. T’as envie de pleurer de joie. « C’est toi ! Je savais, que je n’étais pas dingue ! Qu’il y avait une raison, pour que je me souvienne de ton nom… » tu te coupes et ne parviens pas à t’empêcher de la serrer dans tes bras, soulagé de savoir qu’elle existe. Qu’elle semble aller bien. Tu relâches pourtant ton étreinte rapidement, tu n’oublies pas que vous avez peu de souvenirs et étreindre un inconnu est assez étrange quand on y pense. Tu lui adresses un sourire « hey. Je sais que les circonstances sont assez particulières. Je… J’te demande pas qu’on vive comme si de rien n’était. Je veux dire, en tant que mari et femme. Y’a trente secondes, on ne se souvenait même plus où on s’était rencontrés. Mais… On pourrait peut-être essayer de réapprendre à se connaître, si ça te dit ? » tu perds subitement confiance « ou bien faire comme si cette discussion n’avait jamais eu lieu, si c’est ce que tu préfères. Ton choix sera le mien. J’veux pas te brusquer. »

Ce qui se passe est tellement lunaire que même toi, t’es pas capable d’en croire une seconde. Trop d’infos. Trop de coincidences, trop… ouais, c’est ça, le mot. C’est simplement trop. T’as besoin de comprendre, besoin de te souvenir, et surtout, il faut que tu saches d’où te vient ce sentiment de familiarité avec elle. Complètement largué, tu tentes de te raccrocher aux branches en lui parlant de ce cour qu’elle n’a à priori pas détesté. Tu esquisses un sourire amusé « ça, c’est parce que tu ne l’as pas eu en intégralité ! Je t’assure que mes étudiants, eux, n’ont pas été aussi sympas que toi ! J’ai du réveiller tout l’amphi, à la fin des quatre heures. Vrai moment de solitude ! » tu te mets à rire et ajoutes « hey… je plaisante, pour le parapluie. » tu te mords la langue pour ne pas continuer. Techniquement, il a été à toi, dans la mesure où tu l’as trouvé, mais il a retrouvé propriétaire dans les Hamptons, à la réception de mariage de Barney. T’as quelques vagues souvenirs de cette soirée. De la pluie battante sur ce banc, de Tracy, et du parapluie, justement. Tu commences vaguement à raccrocher quelques pièces du puzzle les unes aux autres, mais rien de suffisamment concret pour crier euréka. « Si ça peut te rassurer… il est chez moi. J’peux te le rendre quand tu veux. » gêné comme jamais de tes effusions, t’as envie de te giffler. Pourtant, tu regrettes pas une seule seconde de l’avoir prise dans tes bras, ta seule véritable peur étant de l’avoir mise mal à l’aise. Tu soupires, soudain silencieux. Parce que t’as tout autant peur de te faire jeter. Ce qui serait son droit, et sans doute même dans la logique des choses : aucun de vous ne se souvient, pourquoi raviver une flamme qui n’a peut-être jamais été ? Et si ça se passait mal entre vous, avant votre arrivée ici, pourquoi risquer de vous faire du mal à nouveau ? Tu fronces les sourcils. Tu ne sais que trop bien qu’avec des si, on refait le monde, tu le fais en permanence. Et tu secoues la tête un peu surpris par sa réaction. « Pardon. J’voulais pas te faire peur. Je ne sais pas ce qu’il en est pour toi, mais j’ai besoin de comprendre. J’ai besoin de savoir… si on est vraiment mariés, pourquoi est-ce qu’on ne se souvient pas ?! » tu te stoppes. Tu lui ferais bien le déroulé de tes réflexions précédentes sur vos hypothétiques bonheurs ou malheurs ensemble, mais t’as pas envie de la faire fuir définitivement « J’ai besoin de comprendre. Voilà ce que je te propose : si t’as rien de prévu… on pourrait peut-être aller prendre un café ? Pas de coup fourré, j’te le promets. » tu regard baisse légèrement vers tes chaussures, tes mains croisées sur tes genoux : bordel, t’as tellement envie de disparaître, là, tout de suite et de te téléporter sur ton canapé pour ne plus jamais sortir de ton salon !

Tu arques un sourcil, dubitatif. Tu ne sais pas si c’était le cours d’un passionné, mais nul doute qu’il ait défrayé la chronique, ça, c’est certain. Tu ricanes « disons… que je peux très vite m’emballer sur les sujets qui me passionnent… qui, soyons honnête, ne passionnent que moi. » tu réprimes un rire, mais dans le fond, ça t’a toujours laissé un léger goût amer. Bien évidemment, tu t’y es fait, avec le temps, mais tu regrettes que la seule chose que tu aies pu partager avec Barney sur la Liberty Bell soit le fait de l’avoir de l’avoir léchée, par exemple. Tu lèves les yeux au ciel, amusé. Tu te demandes toujours si tu vas finir par le retrouver. Tu ne sais pas ce que tu fous là, tout ce dont t’es certain, c’est que t’es pas à New-York, et qu’ici, les pintes sont nettement moins chargées qu’au McLaren’s. M’enfin bref : tu sais aussi que les railleries des autres t’ont pas mal permis de réprimer cette fâcheuse manie à vouloir constamment être le centre de l’attention. « la culture, c’est comme la confiture », dit l’adage. Et si t’as beau être assez cultivé et donc, donner tort à certains aspects de cette expression, t’as fini par comprendre qu’il n’était pas toujours nécessaire que tu aies le dernier mot. Ca te coute, mais ça te rend plus sympathique aux yeux d’autrui.

Tu écoutes Tracy et tu ricanes : oui, elle a raison. Il y a clairement plus normal comme situation. Mais tant que tu ne sauras pas ce que tu fais là, ni comment tu es arrivé ici, plus rien ne te choquera. Pas même le fait de rencontrer ta femme une seconde fois : toi au moins, tu pourras dire que tu as eu la chance d’aimer pour de vrai et, peut-être, d’aimer deux fois. La même personne, qui plus est, quel beau score ! Ok Ted, on se calme. L’époque où tu balançais des je t’aime à la première rencontre est révolue. Tu lui adresses un sourire et lui tends la main dans le but de l’aider à se relever « alors allons-y ! » que tu lances, enthousiaste, en te dirigeant vers le premier débit de boisson qui s’impose à ton regard.

A ses mots, tu lui adresses un sourire. En fait, t’es presque surpris par autant de bienveillance. Et en même temps… pas tant que ça : elle a l’air si douce, si gentille. Le genre à ne pas juger, du moins tu penses. Mais peut-être que, comme bien souvent, tu te montes des histoires. Ou pas : elle est censée être ta femme, après tout ! Tu l’as probablement épousée pour une raison, non ?

Sa main finit par attraper la tienne et t’arrache un sourire aussi impromptu que de circonstance. Aussi étrange soit la situation, t’es content d’être là, avec elle. Vous entrez dans le premier café qui se présente, tu t’installes et vous passez commande. Tu ne sais pas vraiment quoi répondre à sa question. En fait, tu ne sais pas vraiment depuis combien de temps tu es ici, ça te paraît tellement long et tellement soudain à la fois ! Tu secoues la tête « Quelques semaines tout au plus. Je t’avoue que j’ai un peu perdu la notion du temps. Tout est si... » différent ? Étrange ? Hors contexte ? Digne d’une soirée sandwichs à volonté ? Un mélange de tout ça. « Si inattendu » que tu conclus poliment, avant de hausser les épaules « mais c’est très intéressant. Je ne me lasse pas des balades que j’ai pu faire jusqu’ici, j’ai découvert plein de choses ! Et toi… ? Combien de temps ça fait que tu es ici ? » t’espères pas. Aussi con que ça puisse paraître, t’espères ne pas l’avoir fait attendre de trop. Mais t’es même pas certain qu’elle t’attendait réellement : comment patienter après des choses dont on ne se souvient pas ?

C’est étrange, cette connivence qui, pourtant, semble couler de source. Pour toi, c’est simple, facile, évident.Comme si tu n’avais jamais quitté Tracy. Alors pourquoi, bon sang n’as tu aucun souvenir avec elle ? Ça t’en ferait presque flipper, mais tu gardes la tête sur les épaules.

Tu souris en voyant qu’elle a compris ce que tu voulais dire. En même temps, depuis que tu es arrivé ici, t’as l’impression que tu ne saurais pas décrire ce que tu vois, ce que tu ressens. Comme si les mots n’étaient pas suffisants pour… ça Tu hésites, et finis par lui avouer que tu es là depuis quelques semaines. En fait, tu ne sais pas vraiment depuis quand : ça te paraît aussi long que court, quelque chose que t’as jamais vécu et qui te perturbe, pour être honnête. Tu lui adresses un regard désolé, ta main passe sur son épaule. Tu t’en veux, de n’avoir pas été plus vif d’esprit. Mais difficile de trouver, lorsqu’on ne sait pas ce que l’on cherche… ou qui l’on cherche. Tu mordilles ta lèvre inférieure et finis par lâcher « je suis désolé Tracy. J’aurais du te retrouver plus tôt... » tu soupires et lui adresses un sourire compatissant « hey. T’es plus toute seule, tu sais? T’es pas obligée de gérer tout ça dans ton coin. » Mais tu sais que les choses ne sont pas si simples. A sa place, tu n’es pas certain que tu ferais confiance aussi facilement. Et pourtant, t’es le roi de la niaiserie : combien de fois, ça a pu te porter tort ! Espérons que la coutume ne se rejouera pas. Et surtout, qu’elle acceptera cette main tendue...

C’est étrange ; cette sensation. D’un côté, tu as l’impression de la connaître depuis toujours, comme si l’évidence ne résidait pas simplement dans ces anneaux qui trônaient fièrement à vos annulaires respectifs. Mais de l’autre, tu as conscience d’un fait : sans autre indice, tes souvenirs et les siens ne reviendraient pas. C’est alors que tu comprends : que vous le vouliez ou non, vous allez devoir jouer le jeu de cette situation délicate et vous redécouvrir. T’as pas l’intention de faire comme si ce que vous aviez vécu n’avait jamais existé, mais en attendant… tu prends cette rencontre comme un signe : la possibilité d’un renouveau. Tu lui adresses un sourire compatissant, un frisson parcourant ton échine lorsque sa main attrape la sienne. Ses mots, eux, provoquent un pincement dans ta poitrine que tu ne parviens pas à définir, mais qui pourtant te bouleverse. Tu hoches la tête, ta main se refermant doucement sur la sienne, et tu hausses les épaules « ben… Je dirais que … ton prénom et ton parapluie… c’est déjà pas si mal, pour un début ? » tu lui adresses un sourire et mordilles ta lèvre inférieure « tu vis comment, ici ? Je veux dire : qu’est ce que tu fais dans la vie ? Et… par la même occasion… Tu te souviens de ce que tu faisais avant ? » tu marques un léger silence avant de grimacer et t’excuser aussi sec « désolé. Je suis un piètre mari. Quelque chose me fait penser que… tu étais comédienne ? Artiste ? Prof de français ? Non. Pas prof. Un truc artistique. Qui impliquerait Edith Piaf. Et là tu vas me prendre pour un dingue et passer ton chemin. » tu ricanes un peu nerveux : tu ne comprends pas pourquoi, en évoquant son passé la ritournelle française ‘la vie en rose’ n’a de cesse que de mettre à rude épreuve tes souvenirs... Peu à peu, des images te reviennent. Une cérémonie. Un autel. Ton coeur se serre. T'arrives pas à lui en parler mais il est certain que l'air sur ton visage doit être témoin de ce qui se passe sous tes mèches brunes. T'es heureux de t'en souvenir; mais t'as besoin d'encaisser. Et puis, comment réagirait-elle ?! T'as bien trop peur qu'elle se tire pour dire quoi que ce soit.